Adhan

Adhan à la mosquée al-Harâm à La Mecque, en 2013.

Adhan (en arabe : أَذَان, /ʔaˈðaːn/, « appel ») est un terme arabe désignant l'appel à la prière (en arabe : صَلاة sala(t)), en particulier l'appel à la prière en commun.

Trois mots arabes dérivent de la même racine arabe ʾ-ḏ-n أذن, « annoncer »[1] signifiant annoncer :

  • 'Adhan, « appel ».
  • Mu'adhdhin, ou muezzin [2], la personne qui fait l'appel. Le premier muezzin fut Bilal.
  • Mi'dhana[3] ou minaret [4], le lieu d'où se fait l'appel.

Texte et psalmodie de l'adhan

L'adhan peut être entendu dans tous les pays à majorité musulmane aux heures des cinq prières de la journée. Il s'agit d'une annonce publique comportant des phrases définies qui s'inspirent de la chahada, et qui se fait sous la forme d'une récitation scandée et modulée. Toutefois, certains oulémas, en particulier dans l'école hanbalite, se sont opposés à cette modulation[5]. La mélodie du muezzin. Ce moyen de communication publique des heures de prière a été instauré par Mahomet.

Adhan sunnite

Arabe Traduction Translittération
2 fois malikites
4 fois autres[6]
ٱللَّٰهُ أَكْبَرُ Allah est le plus grand ʾAllâhu ʾakbar
2 fois أَشْهَدُ أَنْ لَا إِلَٰهَ إِلَّا ٱللَّٰهُ J'atteste qu'il n'y a de dieu qu'Allah ʾašhadu ʾan lâ ʾilâha ʾillâ -llâh
2 fois أَشْهَدُ أَنَّ مُحَمَّدًا رَسُولُ ٱللَّٰهِ J'atteste que Muhammed est le messager de Allah ʾašhadu ʾanna Muḥammadan rasūlu -llâh
2 fois حَيَّ عَلَىٰ ٱلصَّلَاةِ Venez à la prière ḥayya ʿalâ ṣ-ṣalât
2 fois حَيَّ عَلَىٰ ٱلْفَلَاحِ Venez à la félicité, ḥayya ʿalâ l-falâḥ
2 fois[7]
L'aube seulement (fajr)
ٱلصَّلَاةُ خَيْرٌ مِنَ ٱلنَّوْمِ La prière est meilleure que le sommeil. aṣ-ṣalâtu khayrun mina n-nawm
2 fois ٱللَّٰهُ أَكْبَرُ Allah est le plus grand. ʾAllâhu ʾakbar
1 fois[8] لَا إِلَٰهَ إِلَّا ٱللَّٰهُ Il n'y a de vraie divinité hormis Allah lâ ʾilâha ʾillâ -llâh

Adhan du chiisme duodécimain

Arabe Traduction Translittération
4 fois[6] ٱللَّٰهُ أَكْبَرُ Allah est le plus grand ʾAllâhu ʾakbar
2 fois أَشْهَدُ أَنْ لَا إِلَٰهَ إِلَّا ٱللَّٰهُ J'atteste qu'il n'y a de vraie divinité hormis Allah ʾašhadu ʾan lâ ʾilâha ʾillâ -llâh
2 fois أَشْهَدُ أَنَّ مُحَمَّدًا رَسُولُ ٱللَّٰهِ J'atteste que Muhammed est le messager de Dieu ʾašhadu ʾanna Muḥammadan rasūlu -llâh
2 fois أَشْهَدُ أَنَّ عَلِيًّا وَلِيُّ ٱللَّٰهِ J'atteste que 'Alî est le régent de Allah ʾašhadu ʾanna ʿAlīyan walīyu -llâh
2 fois حَيَّ عَلَىٰ ٱلصَّلَاةِ Venez à la prière ḥayya ʿalâ ṣ-ṣalât
2 fois حَيَّ عَلَىٰ ٱلْفَلَاحِ Venez à la félicité ḥayya ʿalâ l-falâḥ
2 fois حَيَّ عَلَىٰ خَيْرِ ٱلْعَمَلِ Venez accomplir la meilleure action (après « Venez à la félicité ») ḥayya ʿalâ khayri l-ʿamal
2 fois ٱللَّٰهُ أَكْبَرُ Allah est le plus grand. ʾAllâhu ʾakbar
2 fois[8] لَا إِلَٰهَ إِلَّا ٱللَّٰهُ Il n'y a de vraie divinité hormis Allah lâ ʾilâha ʾillâ -llâh

La version des chiites zaydites est identique, sauf qu'ils rejettent la parole "J'atteste que 'Alî est le régent de Allah". L'adhan est suivi de l'iqama qui reprend les mêmes formules (à une phrase près), et marque le début effectif de la prière.

Langue de l'adhan

Traditionnellement, l'appel à la prière se fait partout en arabe (même dans les pays non arabophones). Cependant, en Turquie, entre 1932 et 1950, il était récité en turc sur ordre de Mustafa Kemal Atatürk (voir plus bas la partie consacrée à la Turquie). Adnan Menderes premier ministre turc en 1950, réinstalle l'adhan en arabe.

Appel à la prière de 1932 à 1950 Appel à la prière après 1950 Traduction
4 fois Tanrı uludur Allah'u ekber Allah est le plus grand
2 fois Şüphesiz bilirim, bildiririm, Tanrı'dan başka yoktur tapacak Eşhedüenla ilahe illallah J'atteste qu'il n'y a de vraie divinité hormis Allah
2 fois Şüphesiz bilirim bildiririm Tanrı'nın elçisidir Muhammed Eşhedüenle Muhammeden Rasulallah J'atteste que Muhammed est le messager de Dieu
2 fois Haydi namaza Hayya alessalah Venez à la prière
2 fois Haydi felaha Hayya alelfela Venez à la félicité
2 fois Namaz uykudan hayırlıdır* (Sadece Sabah namazında okunur) Esselatu hayrun minen nevm La prière vaut mieux que le sommeil (uniquement pour la prière du matin)
2 fois Tanrı uludur Allah'u ekber Allah est le plus grand
1 fois Tanrıdan başka tapacak yoktur Lailahe İllallah Il n'y a de vraie divinité hormis Allah

Statut juridique moderne

Bangladesh

En 2016, la cheffe de l'opposition Khaleda Zia a allégué que le gouvernement faisait obstruction à la diffusion de l'adhan par haut-parleur, citant des problèmes de sécurité pour le Premier ministre Sheikh Hasina.

Israël

En 2016, le comité ministériel israélien a approuvé un projet de loi qui limite le volume des systèmes de sonorisation pour les appels à la prière, en particulier les haut-parleurs à l'extérieur, qualifiant l'adhan de source de pollution sonore. Le projet de loi a été déposé par les députés à la Knesset Motti Yogev (parti sioniste d'extrême droite Le Foyer juif) et Robert Ilatov (aile droite Israel Beytenou). L'interdiction vise trois mosquées du village d'Abu Dis à Jérusalem-Est, et veut les empêcher de diffuser l'appel à la prière du matin (fajr). Le projet de loi a été soutenu par le Premier ministre Benjamin Netanyahu qui a déclaré : « Je ne compte pas les fois - il y en a beaucoup trop - où les citoyens sont venus vers moi de toutes les tendances de la société israélienne, de toutes les religions, pour se plaindre du bruit et des nuisances dues au volume excessif des systèmes de sonorisation des maisons de prière. » L'Israel democracy institute, un groupe de réflexion non partisan, s'est dit préoccupé par le fait que cela brimait spécifiquement les droits des musulmans et restreignait leur liberté religieuse.

Turquie

En 1923, le gouvernement de la République de Turquie, avec à sa tête Atatürk, lance une série de réformes et promulgue la laïcité du pays. Ce programme inclut le projet de psalmodie de l'adhan en turc, et non plus en arabe. Le , à la suite des débats sur ces réformes, l'adhan est désormais récité en turc et la pratique se maintiendra pendant dix-huit ans. Cependant, cette récitation en turc a rencontré une certaine résistance, et les protestations sont allées en augmentant. En 1941, une nouvelle loi a donc été promulguée, visant à réprimer ces contestations. Elle stipulait que les personnes qui scandaient l'adhan en arabe encouraient jusqu'à trois mois de prison et étaient passibles d'une amende allant jusqu'à 3000 livres turques.

Le , un nouveau gouvernement dirigé par Adnan Menderes rétablit l'arabe comme langue liturgique.

Suède

En 2013, la Mosquée de Fittja à Botkyrka, commune située au sud de Stockholm, a été la première à obtenir l'autorisation de diffuser par haut-parleur l'appel à la prière du vendredi, à condition que le volume sonore ne dépasse pas 60 dB. À Karlskrona (province de Blekinge, au sud de la Suède), l'association islamique a construit un minaret en 2017, et elle diffuse depuis des appels hebdomadaires. La mosquée temporaire de Växjö a déposé une autorisation similaire en , ce qui a déclenché un débat national sur cette pratique. Une autorisation d'un an a été accordée par l'autorité de police suédoise en mai de la même année.

Koweït

Lors de l'épidémie du coronavirus en 2019-2020 et la pandémie virale qui en a résulté, certaines villes du Koweït ont modifié l'adhan, remplaçant le hayya 'ala as-salah (« venez à la prière » par as-salatu fi buyûti-kum, c'est-à-dire « [faites] la prière chez vous ».

Notes et références

  1. arabe : ʾḏn أذن, « annoncer »
  2. turc : müezzin, de l'arabe muʾaḏḏin مؤذّن, « celui qui fait l'appel »)
  3. arabe : midana, مئذنة, le lieu d'où se fait l'appel
  4. turc : minare, de l'arabe : manāra, منارة, « phare », « tour »
  5. Dominique et Janine Sourdel, Adhân, in Dictionnaire historique de l'islam, Paris, PUF, 1996, p. 33.
  6. a et b Malek Chebel, Dictionnaire des symboles musulmans : rites, mystique et civilisation, Paris, Albin Michel, coll. « Spiritualités », , 500 p. (ISBN 978-2-226-07550-5, OCLC 32375820)
  7. L'appel à la prière du matin n'a pas pour objectif d'annoncer le début de l'heure de la prière, mais de réveiller les croyants, afin que ceux-ci puissent se préparer à la prière en commun.
  8. a et b Ces formules sont facultatives, dites une fois à voix basse et une fois à voix haute.

Bibliographie

  • Dominique et Janine Sourdel, Adhân, in Dictionnaire historique de l'islam, Paris, PUF, 1996, p. 33.
  • (en) Liyakat A. Takim, From Bidʿa to Sunna: The Wilaya of Ali in the Shii Adhan, Journal of the American Oriental Society, Vol. 120, No. 2 (Apr. - Jun. 2000), p. 162-177. (Lire en ligne - Consulté le 30 mai 2020)
  • (en) Hidayet Ayda et Mehmet Atalay, « The issue of chanting the adhan in languages other than Arabic and related social reactions against it in Turkey », Istanbul Üniversitesi ilahiyat Fakültesi Dergisi Sayi (= Journal de la Faculté de théologie de l'Université d'Istanbul),‎ , p. 45-63 (lire en ligne, consulté le )

Annexes

Articles connexes

Liens externes