Shiori Itō

Shiori Itō
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Journaliste indépendant (d)
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伊藤 詩織Voir et modifier les données sur Wikidata
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Shiori Itō (伊藤 詩織, Itō Shiori?) , née en à Kanagawa (Kantō), est une journaliste et réalisatrice japonaise et une militante de la lutte contre les violences sexuelles au Japon.

Biographie

Shiori Ito est née en 1989 à Kanagawa. Son père travaille dans le bâtiment et sa mère est femme au foyer. Elle est l’aînée de trois enfants.

Après une année de lycée dans le Kansas, Shiori Itō suit des études de journalisme à l'université de New York en 2013. Elle effectue ensuite différentes missions entre les États-Unis et le Japon pour l'agence Reuters[1].

En , elle porte plainte pour viol contre Noriyuki Yamaguchi (en), journaliste de télévision de la chaîne japonaise TBS et biographe du Premier ministre japonais Shinzō Abe, dont il est proche[2]. Elle l'accuse de l'avoir droguée lors d'un dîner professionnel puis de l'avoir violée dans sa chambre à l’hôtel Sheraton Miyako de Tokyo. Noriyuki Yamaguchi, qui nie ces accusations, est inculpé par la justice japonaise mais son arrestation est annulée au dernier moment sur demande d'un responsable de la brigade criminelle, proche de Shinzō Abe[3]. L'affaire est finalement classée sans suite en ,[4].

En , Shiori Itō décide de médiatiser cette affaire et s'exprime publiquement sur son viol lors d'une conférence de presse. Elle dénonce en particulier l'attitude de la police qui l'a découragée de porter plainte et qui lui a fait subir une reconstitution particulièrement traumatisante de la scène de viol. En , elle publie son récit dans un ouvrage intitulé La Boîte noire. Elle se heurte à l'incompréhension de ses proches et reçoit de nombreux messages haineux et menaces de mort[5]. Son combat est à l'origine d'une modification de la législation japonaise sur le viol, qui jusque là ne punissait les viols que lorsque la victime prouvait avoir subi des violences ou des intimidations mettant sa vie en danger[6]. Cependant, elle considère que ces lois sont toujours trop restrictives et qu'un programme de protection des victimes est nécessaire[7]. En est adopté un plan porté sur trois ans, visant à réduire les violences sexuelles. La sociologue Chizuko Ueno estime que, grâce à elle, « la société japonaise refuse désormais de tolérer ces violences »[2]. Shiori Itō est l'une des premières Japonaises à témoigner publiquement de son viol[8].

En , Shiori Itō est à l'origine du mouvement #WeTooJapan, déclinaison de #MeToo au Japon[9].

En 2019, elle devient égérie de la marque Calvin Klein pour une campagne spéciale dédiée aux femmes asiatiques[10].

Le , le tribunal de district de Tokyo condamne Noriyuki Yamaguchi à lui verser 3,3 millions de yens (environ 27 000 euros) de dommages et intérêts[11]. Juridiquement, il n'est cependant pas condamné au pénal pour l'avoir agressée mais doit lui verser un dédommagement après avoir reconnu « à demi-mot » l'agression[8].

Avec la tenniswoman Naomi Osaka, soutien du mouvement Black Lives Matter, elle fait partie des deux Japonaises figurant dans le classement des 100 personnalités les plus influentes de l'année 2020 du magazine américain Time[2].

Elle dirige et produit en 2024 le documentaire Black Box Diaries qui revient sur l'affaire. Le film est nommé pour un Oscar du meilleur film documentaire, une première pour une production japonaise[12], mais ne trouve pourtant pas de distributeur au Japon, dans le contexte d'une polémique qui enfle sur les enregistrements clandestins utilisés en 2017, pour documenter l'accusation de viol portée contre « un homme puissant »[6].

Filmographie

Distinctions

  • Association de la presse libre du Japon - Prix de la liberté de la presse pour La Boîte noire[14] (2018)
  • New York Festivals - médaille d'argent pour Undercover Asia: Lonely Deaths[15] (2018)

Notes et références

  1. Rafaële Brillaud, « Shiori Ito, la vérité kamikaze », sur liberation.fr, Libération, (consulté le ).
  2. a b et cPhilippe Mesmer, « Le Japon, "une démocratie sans femme" », sur Le Monde, (consulté le ).
  3. Antoine Terrel, « Le Japon secoué par l'affaire Shiori Ito, qui accuse de viol un proche du Premier ministre », sur LExpress.fr, (consulté le )
  4. Philippe Mesmer, « Le combat de Shiori Ito, agressée sexuellement dans un Japon indifférent », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  5. Philippe Mesmer, « De la difficulté de parler du viol au Japon », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. a et bJohann Fleuri, « #MeToo : nommé aux Oscars, un documentaire japonais rencontre l’hostilité dans le pays », sur Mediapart, (consulté le )
  7. « Shiori Ito, la journaliste qui brise le tabou du viol au Japon », sur www.franceinter.fr (consulté le )
  8. a et bPhilippe Mesmer, « Au Japon, la stigmatisation des féministes », sur Slate, (consulté le ).
  9. Yuuki K, « #MeToo devient #WeToo au Japon - JapanFM », sur japanfm.fr (consulté le )
  10. Yuuki K, « #MeToo : le livre de Shiori ITO publié en France - JapanFM », sur japanfm.fr (consulté le )
  11. « Shiori Ito, la figure de proue de #MeToo au Japon, remporte un procès au civil », sur France 24, (consulté le )
  12. (en) « Japanese long-form documentary film up for Academy Award for 1st time », sur Kyodo News, (consulté le )
  13. « Les distributeurs ajustent leurs line-ups », sur boxofficepro.fr, (consulté le )
  14. « The Free Press Association of Japan announces the seventh annual Freedom Of The Press Award. » (consulté le )
  15. « New York Festivals World's Best TV and Films (2018) » (consulté le )

Article connexe

Liens externes